Maître Corinne Giudicelli-Jahn
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Cour nationale du droit d’asile-notion d’exclusion


           Un recours devant la CNDA peut être formé pour demander une protection en cas de rejet de l’OFPRA ou pour demander le statut de réfugié si l’OFRA n’a accordé que la protection subsidiaire. Après le recours formé, la CNDA doit statuer dans un délai de 5 mois après avoir été saisie ou dans un délai de 5 semaines si la demande d’asile a été placée en mode accéléré ou si la demande a été déclaré irrecevable. Environ 90% des refus devant l’OFPRA font l’objet d’un recours devant la CNDA d’après une étude de 2008. Cette juridiction administrative permet d’accorder ou de refuser la qualité de réfugié et par conséquent le droit d’asile à un individu

            L’asile, « la protection juridique qu'accorde un État d’accueil à une personne qui recherche une protection en raison de craintes d’être persécutée ou exposée à une menace dans son pays. » (CNDA)[1], peut être refusée en application de la clause d’exclusion et de notion d’asile interne. Une clause d’exclusion peut survenir dans la décision des juges si le demandeur n’a pas respecté l’article 1 F de la Convention de Genève qui prescrit l’obligation pour les pays d’offrir l’asile à un réfugié sauf si « ils ont commis un crime contre la paix, un crime de guerre ou un crime contre l’humanité́, au sens des instruments internationaux élaborés pour prévoir des dispositions relatives à ces crimes ».  Dans le même sens, s’il a commis des faits énoncés à l’article L512-2 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile sa demande d’asile en tant que de réfugié sera refusée. En 2018 la Cour a rendu 47 314 décisions, et n’a accordé qu’une protection dans 18,4% des affaires jugées. En 2017, le taux d’annulation des décisions de l’ORFPA était de 16,8% qui est un maximum historique. 

 

          Plusieurs décisions comportant des clauses d’exclusions de la CNDA sont à analyser par rapport à leur portée et la façon dont les articles vus ci-dessus sont interprétés. 

           La décision du 23 septembre 2021 (CNDA 23 septembre 2021 M.N. n° 20030019 C) a refusé l’asile à l’ex-militaire des Forces armées Rwandaise (RFA) du fait de son opposition au régime du président Kagame lors du génocide perpétré au Rwanda en 1994. En effet, la CNDA a constaté que l’ex-militaire était coupable d’un crime contre l’humanité et de crimes de guerre. Ses actions étaient donc en opposition à l’article 1 F de la Convention de Genève ce qui l’a exclu du bénéfice du droit d’asile. Cette décision est un cas commun des recours effectués devant la CNDA.  

           Plus précisément la notion d’exclusion ne se limite pas qu’à la commission d’actes punissables, mais prend en compte la participation aux activités d’un groupe commettant ces derniers. Lors de l’arrêt du 26 septembre 2017 un homme Kurde a vu son statut de réfugié (acquis en 2003) annulé par l’OFPRA à cause d’une clause d’exclusion. Ce dernier a fait valoir qu’il craignait des persécutions par les autorités turques en cas de retour dans son pays (CNDA GF 26 septembre 2017 M. K. n°16029802 R). Dans ce cas, la CNDA a déclaré que la simple participation aux activités d’un groupe terroriste permet que soit appliquée la clause d’exclusion et qu’il ne fallait pas nécessairement une commission d’acte terrorisme. Les juges déduisent de l’article 1ier F c) de la Convention de Genève, que les « agissements contraires aux buts et principes des Nations unies » comprenaient donc la simple participation et non seulement la commission d’actes terroristes.

            Les recours contre les décisions rendues par la CNDA sont jugés devant le Conseil d’État. La commission de crime sur un territoire d’accueil peut entrainer des poursuites pénales et une exclusion du territoire, cependant comme vu dans la décision (CE, 25 septembre 1998, 165525, R,elle ne peut être utilisée comme motif pour refuser la qualité de réfugié au sens de l’article 1ier de la Convention de Genève. Dans cette décision, le Conseil d’État a jugé que le demandeur était fondé à invoquer l’annulation de la décision lui refusant la qualité de réfugié et qu’il devait repartir devant la CNDA. La notion d’exclusion ne peut donc pas être utilisée pour tout crime commis. La Convention de Genève définit précisément l’emploi de l’exclusion au statut de réfugiés. 

            Dans une autre décision de 1996, (CE, SSR, 15 mai 1996, 153491, Rle Conseil d’État réaffirme que la présomption d’innocence ne peut être utilisé pour contrer la notion d’exclusion. EN effet tout homme est présumé innocent avant son jugement, mais pour utiliser la clause d’exclusion il suffit d’une forte suspicion de crime. Dans ce cas, l’individu bénéficiait du principe de la présomption d’innocence, cependant il existait de raisons sérieuses de penser qu’il avait commis dans son pays un crime grave de droit commun et pour lequel il avait fait objet d’une condamnation à mort et par conséquent les juges ont admis que c’est à bon droit que les juges de l’OFPRA ont refusé l’admission au statut de réfugié. L’objet des poursuites intentées contre lui aurait été sa place dans des fonctions de responsabilité au sein du « Front islamique du salut » en Algérie. 

 

           L’article 1 F de la Convention de Genève est interprété par les juges leur permettant de manier la notion d’exclusion. Une exclusion du droit d’asile et de la qualité de réfugié peut cependant être contestée devant le Conseil d’État ce qui laisse une troisième chance. 

 

 

 


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